Essai Honda Civic Type R : la FL5 est elle à la hauteur d’un trackday Honda ?

Pour la deuxième fois, le circuit de Mornay a été l’écrin de choix pour le TH Exclusive Type R. Nous avons décidé de nous rendre à cette grande messe Honda au volant de la nouvelle Civic Type R.

Si les allégations et décisions des autorités laissent penser le contraire, la passion automobile en France n’est pas morte. Preuve en est avec les différents évènements qui peuvent se dérouler à guichet fermé, qu’il s’agisse de compétition très sérieuses comme les 24 Heures du Mans, ou de rendez-vous au ton plus léger à l’image du Merguez Tuning Show ou du GP Explorer. Reste que si ces évènements attirent tous les projecteurs, ils ne sont pas les seuls à se dérouler en France.

Parmi les nombreux rendez-vous de ce type, nous avons rapidement remarqué le TH Exclusive Type R. Derrière ce rassemblement organisé dans le magnifique cadre qu’est le circuit de Mornay se cache Thomas Hovette, fondu des Honda à cache culbuteur rouge. Si bien que ce passionné de bijouterie, aussi, a décidé de réunir ces deux univers avec sa société Th Automotive Jeweller, dont le catalogue de bagues s’inspire des moteurs Honda doté de la technologie VTEC. Une légende urbaine raconterait même que son cœur bat à 9 000 tr/min.

Cette passion aussi dévorante que débordante est aussi partagée avec les férus de la marque, qui forment une véritable communauté aux quatre coins du monde, mais aussi en France. Ainsi, ce ne sont pas moins de 235 personnes qui ont transité dans le centre de la Creuse pour le plus grand rassemblement de Honda Type R dans l’Hexagone. Nous nous sommes joints à la fête au volant de la dernière génération de Honda Civic Type R pour mettre à l’épreuve sa polyvalence, mais aussi son capital sympathie auprès des passionnés de la marque.

Rendez-vous en Suisse

Contrainte logistique oblige, c’est à Genève, en Suisse, que le premier rendez-vous a été fixé afin de récupérer les clés de la sportive compacte. Tapie au fond de l’atelier, sous une caisse en blanc d’un NSX de première génération, la Civic Type R en jette : abaissée de 19 mm et élargie de 15 mm pour faire passer ses énormes pneus Michelin Pilot Sport 4S de 265 mm de large, la Type R fait oublier le coup de crayon sans véritable saveur de la compacte hybride dont elle dérive. Un choix global voulu par la marque, sans doute pour séduire ceux qui avaient un peu de mal à assumer le côté manga des précédentes moutures. Soit.

A bord, la Type R reprend la planche de bord de la déclinaison civile, qu’elle associe à une atmosphère particulièrement sportive avec un plancher rouge vif, un volant en Alcantara et, petite pépite devenue rare de nos jours, une commande de boîte aussi belle à regarder que jouissive à manipuler. Elle reprend le pommeau en aluminium lesté de 90 g pour améliorer les coups de poignets ! Dommage, l’insert sur la console centrale qui imite bien mal la fibre de carbone fait tâche. Un menu détail cosmétique qui sera bien vite oublié sur les petites routes, où les yeux seront davantage rivés sur l’horizon qui se rapproche.

Mais il faudra attendre pour cela car, encore une fois par contraintes, nous décidons d’emprunter l’autoroute jusqu’en périphérie de Lyon, où nous attend Charles et sa superbe Honda Integra Type R importée du Japon. Et l’analogie avec cette ancien coupé ne manque pas de sens : la nouvelle Civic Type R tient plus de l’Integra que de la première génération de Civic Type R de type EK9 lancée en 1997. Mais avec ses portes arrières et sa longueur de 4,59 m, elle évoque davantage l’exclusive Civic FD2 de 2007, ou la tout aussi rare Honda Accord Type R : cette banale familiale qui n’avait rien demandé a été déclinée en version sportive avec un H22A7 de 212 ch. Un collector !

Comme sa devancière, la Civic Type R d’aujourd’hui ne sacrifie en rien ses aspects pratiques. Si les sièges peuvent se montrer vite inconfortables sur les plus longs trajets en raison de leur étroitesse, elle conserve une habitabilité en haut du tableau. Et c’est notamment le cas aux places arrière, généreuses même pour deux adultes. Le coffre, gigantesque, permet d’y loger suffisamment de bagages, des équipements pour les trackday, ou même une Honda Motocompo, utile pour se promener dans les paddocks. Un luxe que bien des SUV contemporains ne peuvent pas se permettre.

VTEC kicked in, yo !

Dans un ronron jamais désagréable sur le sixième rapport, avalant à peine plus de 8,0 l/100 km en moyenne, la Type R file droit dans sa ligne sur l’autoroute. L’insonorisation impeccable laisse peu de place aux bruits d’air, mais les pneus, eux, savent se faire entendre. Tout comme l’Integra Type R, dont le comportement mécanique de son K20 n’a presque aucun équivalent sur terre : dès les 6 000 tr/min, le profil de came évolue et donne un second visage au 4-cylindres.

La Civic Type R, bien que dotée de la solution technique, n’est pas aussi exubérante. Même dans son mode de conduite +R le plus extrême, à réserver à la piste toutefois, la poussée est linéaire. Une froide efficacité, derrière laquelle se cache de nombreuses améliorations par petites touches, dans le plus pur esprit Kaizen : admission revue, turbo repensé, volant moteur allégé et rapports de réétagés. Tout participe à l’amélioration d’un moteur déjà réussi. Désormais, ce K20C1 repris de la Type R FK2 délivre 329 ch pour 420 Nm de couple. Voilà qui permet, malgré les quelques kilos supplémentaires, de faire chuter le 0-100 km/h à 5,4 s et de pousser la v-max à 275 km/h !

Côté sonorité, rien n’y fait. Pas même le système artificiel embarqué, qui évolue au fil des modes de conduite ou réglable depuis le menu individuel. Même si elle semble un minimum travaillée, la bande originale à de quoi faire rougir cette Civic rouge pétant à l’approche du circuit de Mornay, où les zones rouges repoussées sont très régulièrement chatouillées.

Un bien drôle de langage

Dès que l’on passe les portes du superbe domaine de Mornay, on entre dans un autre monde, avec son propre dialecte : « après les WCE tu tournes au niveau de la DC2 et tu te gare en face de l’EP3. Il y aura d’autres FL5 et une EK9 qui arriveront ». Derrière ces acronymes se cachent les codes châssis propres à chaque modèle Honda. Même celles que nous connaissons sous les célèbres noms de NSX ou S2000 se font ici appeler NA ou AP respectivement, suivi des chiffres 1 ou 2 en fonction de la génération. Et les appellations techniques des moteurs ou de certaines pièces sont aussi de la partie lors des discussions passionnées. Difficile de s’y retrouver pour les néophytes, toutefois rapidement accompagnés par les propriétaires de ces Honda colorés.

Car si la célèbre teinte blanche White Championship est à l’honneur lors de cet évènement, les couleurs ne sont pas rares. Même au milieu des NSX, ces « Ferrari japonaises » uniformément rouges, se trouve un superbe exemplaire Orange Imola (qui parlait d’Italie ?) du coupé à moteur arrière. A cela s’ajoute de nombreuses fantaisies habituelles dans la sphères des automobiles japonaises, avec des jantes aftermarket voyantes ou des peintures de guerre en hommage à la marque au H. Bien loin de la sobriété de quelques anciennes, à l’image de ce génial Honda T500, cette étonnante Prélude, pardon, SN, ou encore de ces respectables S800.

La passion menacée ?

Ces dernières ne fouleront la piste que pour des parades ou séances photos à un rythme de sénateur sur la piste. Des conditions qui n’éveillent pas les soupçons du voisinage du circuit, à l’affût du moindre décibel de trop au milieu de la campagne. Car elle est comme ça, aujourd’hui, la passion automobile : les riverains installés en périphérie des circuits attendant au tournant les passionnés. Et la pression est si forte, et les sanctions si disproportionnées, que les propriétaires des circuits sont obligés de faire la police avec un sonomètre en main ! Si la vitesse est largement réprimandée sur la route, ce sont les régimes moteurs qui sont surveillés sur les pistes. Un bien drôle de paradoxe quand l’évènement en question est une ode aux zones rouges.

Si l’étau se ressert sur la voiture passion, la nouvelle Civic Type R n’a pas à être inquiétée. Même avec le couteau entre les dents, elle pourrait presque être furtive au milieu des autres pistardes de ce week-end. Mais le plaisir est ailleurs : avec le bitume lisse, le mode +R casse gueule sur route (le fessier se soulève du siège sur les bosses, tout comme les roues de la chaussée) fait entrer la compacte dans une autre dimension. Car dans ce mode de conduite extrême, le châssis rigidifié travaille avec une suspension encore plus affermie, qui ventouse les pneus à la piste.

La motricité indestructible permet de ressortir comme un boulet de canon des virages, alors que la direction permet de viser avec précision le point de corde. Cependant, ne lui demandez pas d’aller jouer comme une AP1 ou même, dans une moindre mesure, une FK8 : le train arrière est rivé au sol et ne se déhanche jamais. Elle préfère l’efficacité froide d’une voiture de time attack. Avec le rev-matching enclenché, qui réalise automatiquement le talon-pointe au rétrogradage (il est possible de le faire soi même), la voiture met le pilote en condition. Et la vocation de ce missile est clairement assumée, comme le prouvent l’ensemble des données projetées sur l’instrumentation numérique, ou le dispositif LogR pour enregistrer les données.

Dans la zone rouge… tarifaire

Qu’il s’agisse de ce modèle rouge, ou des autres exemplaires avec lesquelles le drapeau tricolore a pu être formé, cocoricco, la nouvelle Honda Civic Type R de type FL5, a remporté l’exercice de l’applaudimètre auprès de cette communauté réunie par Thomas. Et ce malgré ses quelques griefs de voiture moderne, à l’image des béquilles électroniques, du poids, de la sonorité étouffée ou de l’absence totale d’effet VTec. Qu’importe, sa polyvalence a de quoi séduire les passionnés qui recherchent deux autos en une, capable d’assurer les missions du quotidien (non sans quelques sacrifices quand même), de s’offrir une virée sportive sur les routes secondaires, ou aller par la route à des journées trackday pour y assurer des tours comme une vraie pistarde. Certains y ont même vu une remplaçante de choix à leur CR-V ou autre Jazz du quotidien.

Mais malgré toutes ses qualités, l’annonce du prix final à de quoi refroidir : au chèque déjà coquet de 57 220 € à signer en concession Honda, il faudra poser 12 552 € sur la table de la préfecture cette année pour s’acquitter du malus écologique. La zone rouge, c’est définitivement son truc. Qu’importe, elle est déjà un mythe dans la famille Honda !

Crédit photos : Mickael Roux et auteur

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